Prothèse maxillo-faciale, Medical Departement Repair Shop – États-Unis
Acier inoxydable, cuir, premier quart du XXème siècle.
Don de Mme Catherine JAZAT, janvier 2021.
Acier inoxydable, cuir, premier quart du XXème siècle.
Don de Mme Catherine JAZAT, janvier 2021.
Lorsque la blessure survient, la prise en charge du soldat doit être immédiate afin d’éviter des complications telles que les infections, les cicatrisations vicieuses ou le blocage des parties fonctionnelles. En effet, la reconstruction osseuse et tissulaire est rapide. Les services de santé étant rapidement débordés, des retards dans l’acheminement du soldat, de la zone du front jusqu’aux centres spécialisés de l’arrière, sont fréquents. Certains mettent 45 jours pour effectuer cette liaison. Entre temps, les complications citées plus haut peuvent apparaitre, accentuant la difficulté, parfois irréversible, du recouvrement facial.
Pour pallier à ces complications, l’utilisation de prothèses de contention est parfois nécessaire. Notre objet fait partie de ce traitement prothétique censé aider à la reconstruction fonctionnelle et esthétique d’une lésion maxillo-faciale. Ces blessures se caractérisent par une plaie béante au niveau du visage, provoquée en très grande partie par des projectiles propulsés à très grande vitesse. Issu du Medical Departement Repair Shop de l’American Expeditionary Force (Corps expéditionnaire américain durant la Première Guerre mondiale), notre appareil a un rôle provisoire dans le traitement de réparation des blessés. Au moyen de gouttières, ligatures, arcs et maintiens, l’appareil guide et consolide, dans une position optimale, la cicatrisation. Nous sommes sur un traitement plus fonctionnel qu’esthétique, censé rendre la motricité buccale du blessé. C’est une étape de la reconstruction faciale, venant en complément du traitement chirurgical.
Dans ce cas précis, on parle de contention intra-buccale à point d’appui extra-buccal, c’est-à-dire que les ligatures de contention, situées dans l’orifice buccal, sont reliées à une mentonnière elle-même liée à un appui crânien. Une multitude de vis sont présentes sur l’ensemble pour fixer et maintenir l’objet sur le porteur. On remarque que la mentonnière et les ligatures semblent amovibles du cerclage crânien. Sans doute était-il possible d’utiliser d’autres mécanismes de contention, qui diffèrent selon la blessure ?
Notre objet est l’un des nombreux exemples de prothèses testées et utilisées pour soigner les blessures maxillo-faciales qu’a engendré la Grande Guerre. Certaines ont été bénéfiques pour le recouvrement fonctionnel et esthétique, tandis que d’autres, aux procédés archaïques, ont ajouté davantage de souffrances aux individus.
Fiche technique
Matériaux et techniques : cuir rembourré, acier inoxydable
Dimensions : 37cm de hauteur ; 26cm de diamètre
Acquisition : Don de Mme Catherine Jazat, janvier 2021
Numéro d’inventaire : 2021.5.1
Les « Gueules cassées »
Ce dispositif médical fait ressortir toute la violence des blessures infligées aux corps par les armements de la Première Guerre mondiale (artillerie et mitrailleuses en premier lieu), blessures encore plus cruelles lorsque celles-ci concernent le visage.
En France, environ 4 300 000 hommes ont été blessés, en comptant les blessés légers. Parmi les blessés les plus grièvement atteints, on compte 388 000 mutilés dont 15 000 frappés au visage. Ces blessés seront appelés un peu plus tard, les « Gueules Cassées ».
On pourrait dire qu’il n’y a pas plus terrible blessure que celle subie au visage car elle ôte toute humanité au blessé.
La médecine militaire est, dans les premiers mois de la guerre, bien impuissante, à prendre en charge ces blessés. Une branche de la médecine, balbutiante, va devoir être développée dans des proportions inédites pour faire face à ces nouvelles formes de pathologie : la chirurgie réparatrice maxillo-faciale. Dans des centres spécialisés situés en arrière de la zone des armées, des techniques chirurgicales ou non chirurgicales sont mises en place, par empirisme, afin de remodeler les visages. Les premières s’appuient sur des greffes, nécessitant de nombreuses interventions dont le résultat demeure très aléatoire avant de s’améliorer au cours du conflit. Pour les secondes, on applique des prothèses ou des appareillages sur le visage des blessés afin d’obtenir les cicatrisations souhaitées.
À défaut de réussite, des masques sont créés afin de masquer les déformations et mutilations du visage…
Rassemblés dans une expérience douloureuse physique et psychologique, conscients de l’effroi que la vision de leurs blessures suscite auprès des autres soldats et des populations, les blessés maxillo-faciaux se regroupent dans une association fondée quelques années après la guerre. À l’initiative d’une quarantaine de vétérans, dont Albert Jugon (1890-1959), Bienaimé Jourdain (1890-1948) et le colonel Yves Picot (1862-1938), est créée en juin 1921 l’Union des Blessés de la Face, surnommés « Gueules cassées ».
Cette année 2021 marque le centenaire de cette institution qui continue d’agir encore à l’heure actuelle et dont la devise demeure « Sourire quand même ».
Un message d’espoir et d’optimisme.
Découvrez leur site Internet https://www.gueules-cassees.asso.fr/
Les services de santé, au Mémorial de Verdun
Les chiffres sont des estimations mais ils montrent l’ampleur de la catastrophe. En 1916, environ 216 000 blessés français et 196 000 allemands sont recensés sur le front de Verdun. Les services de santé procèdent à leur triage rigoureux entre blessés transportables et intransportables et repèrent les urgences.
Pendant la bataille, le service de santé allemand utilise un réseau ferroviaire dense pour évacuer les blessés vers les lits qu’il a préparés par Metz (4 heures de trajet), Thionville et jusqu’en Allemagne, selon le degré d’urgence et la gravité des blessures.
Le service de santé français organise son dispositif en quelques jours. Il est gêné par la rareté des voies d’évacuation et par la rapide avancée allemande. Il est contraint de réadapter son dispositif plusieurs fois et crée des « hôpitaux d’évacuation » et des « ambulances », structures sanitaires complètes, parfois mobiles.
Au Mémorial de Verdun, une salle d’opérations est présentée. Pendant la bataille, les chirurgiens opèrent sans cesse des soldats blessés en plusieurs endroits par des éclats d’obus. Les atteintes les plus fréquentes sont aux jambes, à la tête et aux bras. La plupart des opérations urgentes sont réalisées à 10-20 kilomètres du front. Les autres cas sont traités au-delà, souvent à plus de 50 kilomètres. Les chirurgiens doivent faire face à des afflux soudains de blessés lors des grandes offensives. Les équipes chirurgicales se relaient : il faut 24 heures à 4 équipes pour opérer 30 à 50 grands blessés. Ils opèrent dans une salle désinfectée où les blessés entrent un par un. Ces mesures limitent les infections et la gangrène, causes redoutables de mortalité au début de la guerre.
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